J’ai passé une année au pays du Père Noël !
Jusqu’au bout du monde
Quand on t’annonce qu’on t’embarque dans un voyage de plus de 2500 kilomètres en minibus, durant 9 jours, à travers toute la Finlande et jusqu’au bout du monde en Laponie avec une équipe de 9 personnes dont 5 handicapés (mentaux et physiques), d’abord tu trouves ça génial et juste après tu stresses comme jamais.
Puisque je vous écris c’est qu’on en est revenu vivant mais c’était loin d’être facile ! L’idée du voyage était avant tout de visiter diverses institutions et associations travaillant avec des personnes handicapées et de présenter Radio Valo (pour qui je travaille dans le cadre de mon SVE) mais aussi de proposer des workshops radio et vidéo. Autant dire que l’on a pas chômé. La Finlande on l’a essentiellement vu à travers les fenêtres du minibus et on avait deux à trois présentations/workshops par jour. Un emploi du temps plus que chargé mais disons que tout cela c’est la partie visible de l’iceberg.
Voyager avec des handicapés est en soit un travail à un plein temps qui aussi enrichissant qu’exténuant. Il n’y a pas de pause et pas ou très peu de temps pour soit. C’est ce que j’ai appris et que tout le monde doit apprendre, entendons par là la société en générale, que quelqu’un d’handicapé n’a pas pas besoin d’aide ou de soutien sporadique mais tous les jours et bien souvent à toute heure. Ce sont des personnes qui pour avoir une vie, pour évoluer, pour apprendre, pour avancer, doivent bénéficier d’une part de la notre. Quelqu’un en chaise roulante à moitié paralysé doit être poussé, porté, lavé, nourri, quelqu’un qui n’a pas de sens de l’orientation, peu d’attention et des difficultés à apprendre doit être guidé et accompagné, quelqu’un qui ne se maitrise pas, qui n’a pas conscience des limites doit être surveillé et entouré... Je pense que tout le monde à saisi l’idée mais peu l’applique. C’est difficile. Ça nous pousse hors de nos limites, on a parfois envie de tout foutre en l’air, de leur gueuler dessus voir de les secouer un peu, ils vous absorbe toute votre énergie mais c’est comme ça, on se doit de faire avec. S’il y en a un qui s’enfuit pour s’amuser alors tout le monde le cherche, on perd du temps et on s’énerve mais on ne l’engueulera pas, s’il y en a un qui doit pisser toute les 5 minutes en voiture on s’arrête et on patiente, s’il y en a un qui pense être malade toute les 20 minutes on fini par l’emmener à l’hôpital même si on sait pertinemment qu’il n’a rien, s’il y en a un qui passe ses nuits à parler plutôt qu’à dormir on prend son mal en patience et on reste zen... Et ceux qui disent que c’est comme s’occuper d’enfants, vous faites fausse route car eux ils sont adultes et ils resteront ainsi. Et au milieu de toute ça ils y a des moments de fou rire, de poésie et de tendresse car avec eux on fait tout ensemble ou on ne fait rien.
On aura vu des gens qui font leur maximum avec peu de moyens, d’importantes institutions qui font peu car peu de moyens, d’immenses forêts qui ne finissent jamais, le père noël, les ravages de la drogue à Rovaniemi, la lumière hypnotisante du nord, la nuit sans lumière particulièrement sombre et dense, la neige qui vient illuminer l’obscurité, le brouillard qui vous isole là où l’espace est sans fin, on aura délié les langues au sauna, dégusté quelques bières salvatrices, mangé des choses plus ou moins douteuses et on aura brièvement entendu le silence profond de la Laponie, celui la même qui résonne dans le coeur de tous les finlandais. Neuf jours qui ont paru physiquement et psychologiquement longs mais qui sont allés très vite, tout se passait au pas de courses mais au final tout le monde s’en souviendra. Bordel de merde, c’est qu’on était jusqu’au bout du monde !
Jocelyn.